Comment j’ai vaincu la réactivité de Diego (ou comment j’ai appris tout ce que je sais aujourd’hui sur la réactivité canine)
Lorsque j’ai adopté Diego à 3 mois, il était comme n’importe quel chiot : enthousiaste, joueur, câlin, mais tout de même sensible (abandonné à la naissance, le traumatisme refera surface plusieurs années plus tard, j’y reviendrai). Nous vivions à Bordeaux à l’époque, la périphérie peu peuplée nous convenait parfaitement. Nous étions heureux.
La première mauvaise expérience avec un humain a eu lieu à ses 6 mois, lorsque le vétérinaire dont il avait une peur bleue l’a violemment attrapé par le harnais pour le forcer à rentrer en consultation. La deuxième expérience négative, cette fois avec un petit chien, à ses 15 mois lorsqu’il a été mordu au mollet. 2 mois plus tard, je ne reconnaissais plus mon chien : il attaquait tous les petits chiens qu’on croisait, il avait généralisé sa peur. Quant aux humains, les espaces étroits rendaient les croisements extrêmement difficiles, Diego se sentait pris au piège. Il ne leur faisait plus confiance. Il faut savoir que Diego est un chien extrêmement sensible : il est capable de m’épauler pendant des moments de difficulté émotionnelle à l’instar d’un chien d’assistance, mais est également un chien qui marque à la première expérience négative. A l’époque, je n’étais pas formée et ne comprenais pas ses inquiétudes; je le forçais à avancer malgré ses refus (chien têtu ou chien angoissé? à vous de juger)…cela s’est traduit par une réactivité envers les humains, en laisse et uniquement autour de la maison.
Le point de non retour a été atteint pendant que je suivais ma formation d’éducateur canin. J’étais épuisée, j’appréhendais chaque sortie et je n’avais pas suffisamment de recul pour gérer correctement la situation. Les critiques sont tombées comme des bombes, notamment de la part de notre entourage proche, Diego était perçu comme “un monstre, un toqué”. Ces mots ont résonné comme un tremblement de terre duquel j’ai encore aujourd’hui du mal à me remettre.
Nous avons été accompagnés par des super collègues. Diego a été placé sous médication lourde pendant 6 mois afin de réduire son taux de stress. Les débuts de la thérapie médicamenteuse ont été difficiles, il ne mangeait que très peu et était complètement amorphe (la médication avait pour effet d’inhiber tout comportement). Je lui ai laissé le temps de s’habituer à la médication avant de débuter les entraînements. En attendant, il se reposait.
Pendant cette période, j’ai mis en place un tableau pour une collecte de données : qu’est-ce qui le faisait réagir? à quel moment de la journée? à quelle distance? à quel endroit? comment avais-je réagi face à la situation? etc… ce tableau a été précieux puisqu’il m’a permis d’analyser les évènements avec un recul suffisant et d’adapter les sorties au fur et à mesure des progrès/régressions.
J’ai décidé de sevrer Diego du traitement médicamenteux au bout de 6 mois, car il avait énormément progressé ; le sevrage a été fait très progressivement, afin d’éviter un effet boomerang…la réactivité a refait surface mais pas autant qu’avant car nous avions déjà énormément progressé au niveau rééducatif. Le travail de connexion s’est révélé indispensable.
Consciente que mes émotions polluaient notre quotidien (Diego est une éponge), j’ai décidé de prendre soin de moi en nous offrant une séance de magnétisme. Sans rentrer dans les détails, nous avons vécu un ascenseur émotionnel qui nous a libérés de plusieurs blocages…les balades successives n’étaient désormais plus aussi infernales et anxiogènes.
L’aménagement d’environnement, des rythmes de balade (je nous ai accordé beaucoup plus de repos), le changement d’alimentation et de vétérinaire ainsi que le soutien de mes proches, sans jugement, ont été précieux.
Au bout d’un moment, bien que Diego avait fait d’énormes progrès, je trouvais qu’il stagnait. Je me suis alors intéressée à la zoopharmacognosie et c’est là que j’ai vu à quel point les traumatismes étaient ancrés en lui. Ses réactions face aux remèdes ciblés sur les émotions et traumas du passé étaient fortes, mais je voyais qu’il en avait besoin pour progresser.
Aujourd’hui, après 3 ans de travail, je peux dire que la réactivité de Diego est résiduelle. Il ne tolère pas certaines situations, je ne l’oblige donc pas à les subir bien que je travaille toujours pour améliorer son seuil de tolérance. Contrairement à il y a 3 ans, il est aujourd’hui capable de me faire confiance face à une situation stressante. Il m’accompagne en cours pour aider d’autres chiens à mieux se sentir dans leurs pattes et ça, c’est le plus beau cadeau qu’il puisse me faire. Il épate également les humains en demandant de plus en plus d’interactions.
Ce récit ne retrace qu’une infime partie de ce que nous avons vécu et n’est certainement pas le plus passionnant. Il a néanmoins pour objectif de vous montrer que
– l’éducation n’est pas synonyme de chien parfait. Assis/couché/pas bouger maîtrisés ne vont pas résoudre la réactivité car il est indispensable de prendre en compte les émotions liées au comportement. Et pour changer une émotion, cela demande du temps et beaucoup de patience.
– il est important de se faire accompagner par des professionnels ayant une approche globale (qui puissent vous orienter vers un ostéopathe, vétérinaire etc en cas de doute sur une éventuelle pathologie sous-jacente)
– il est important de prendre soin se soi avant de prendre soin de nos chiens. Si nous ne sommes pas dans un état psychologiquement “serein”, la cohabitation peut rapidement se transformer en calvaire. Une simple séance de méditation tous les soirs peut aider à faire la différence.
– enfin, il est indispensable de s’éloigner de ce(ux) qui nous fait du mal : le jugement des autres face à la réactivité de notre chien est extrêmement blessant. Sachez que ce qui compte le plus c’est le bien-être de votre binôme, pas la perception que les gens ont de vous.
Prenez soin de vous avant de prendre soin de vos chiens.
Remerciements : Eugénie, Catherine, Fabrice, Marina, Clémence, Tram-Anh, Céline, Daniela, Blandine, Lola, Elio, Frédérique, Mélanie, Arnaud, Clément, Violaine, Stéphane, Alexandra, Karine, Vanessa, Astrid, Marion et tous mes clients qui ont rencontré Diego et n’ont pas forcé le contact. Vous avez tous participé à des niveaux différents au bien-être de Diego en nous accordant votre confiance et en nous soutenant émotionnellement.